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Par myrto le 29 Juillet 2016 à 02:09
Vivre avec un chien est une si belle aventure
mais tellement trop courte !
[…] "Ce n’est pas à « t’écrire », à « te parler » que je joue, du moins au sens premier des expressions. Je te parle, comme on dirait, je te dessine. Je te chante comme on chante une victoire, une allégresse. Je te mets en paroles et en mots. Peintre, je passerais mes moments d’oisiveté à faire de toi des croquis, à fixer en traits de plus en plus justes et légers tes étirements, tes mises en rond, tes aplatissements, tes élongations ventre en l’air, tes postures dressées d’écureuil, tes langueurs, tes prudences de princesse rétive. A défaut de dessin, j’use de mots. Je te guette. Je te formule. Je te serre au plus près, je te répète, je te précise peu à peu jusqu’à espérer que mon texte te ressemblera, de la ressemblance approximative, inventée mais frémissante, que la tendresse donne aux poèmes." [...]
[…] "Je me suis souvent demandé, au long des insomnies, quand j’écoute ta respiration, quand tu pèses de tout ton abandon sur ma jambe ou mon dos, ou lors de ces quelques nuits blanches passées à te veiller, je me suis demandé ce que signifient ces excès de ma tendresse pour toi, cette peur viscérale de te voir souffrir ou de te sentir menacée." [...]
"Lettre à mon chien" de François Nourrissier à sa petite teckel – Extraits (Gallimard 1975)
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Par myrto le 1 Juillet 2016 à 01:37
L'artiste colombien Federico Uribe transforme des centaines de munitions, balles, grenades, cartouches en sculptures d'une force impressionnante.
A travers ces oeuvres très vivantes c'est la guerre, le meurtre, la mort qui sourd et percute la sensibilité.
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Par myrto le 11 Juin 2016 à 01:19
Camille Claudel - La Vieille Hélène
La petite vieille ratatinée se sentit toute réjouie en voyant ce joli enfant à qui chacun faisait fête, à qui tout le monde voulait plaire ; ce joli être, si fragile comme elle, la petite vieille, et, comme elle aussi, sans dents et sans cheveux.
Et elle s’approcha de lui, voulant lui faire des risettes et des mines agréables.
Mais l’enfant épouvanté se débattait sous les caresses de la bonne femme décrépite, et remplissait la maison de ses glapissements.
Alors la bonne vieille se retira dans sa solitude éternelle, et elle pleurait dans un coin, se disant : — « Ah ! pour nous, malheureuses vieilles femelles, l’âge est passé de plaire, même aux innocents ; et nous faisons horreur aux petits enfants que nous voulons aimer ! »
Charles Baudelaire - Petits poèmes en prose - 1869
Camille Claudel - La Vieille Hélène
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Par myrto le 4 Juin 2016 à 01:11
La plage de Sète à Marseillan. Plus de soleil, pas de vent, presque le soir, mort des vagues...
La mouette ne rit plus sur l'écume envolée
Le voilier s'est figé dans le large incertain
Dieux ! que la mer est lisse et semble de satin...
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Par myrto le 1 Juin 2016 à 01:59
Ces trois mots-titres chantent doucement devant les dessins de Simin Massoudi Meykadeh, artiste iranienne qui vit et travaille à San Francisco depuis 1983.
Peu de renseignements sur cette artiste dont les portraits à l'acrylique sur toile sont également très touchants.
Ses œuvres sont dans de nombreuses collections privées et son travail est présent dans la collection permanente du Musée royal de Jordanie à Amman.
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Par myrto le 28 Mai 2016 à 11:59
Retrouvée la maison triste et seule, vide de toute âme depuis de longs mois ! Retrouvée sous la pluie comme il se doit. Deux jours de pluie froide et perçante qui m’ont fait croire un instant que le temps dans mes vieilles montagnes s’était figé en novembre. Pourtant tout est là. L’extravagante végétation printanière de ce pays de pluies, de brumes et de ruisseaux, donne à la nature une sorte de dimension supplémentaire, une épaisseur, comme si arbres, taillis, forêts centuplaient le temps du printemps. Le végétal en effervescence mousse de vie et grandit sous mes yeux ébahis.
Retrouvé mon père, il n’est pas seul dans une maison de retraite qui n’est pas triste… Pourtant je sais bien qu’après plus de deux ans passés dans cet endroit qui doit lui rappeler l’internat de son enfance, il est loin d’être à son aise. Lorsque l’on a 93 ans et qu’une nature fougueuse continue de vous animer, les révoltes forcément vous consument.
Et pour moi, beaucoup d’efforts pour revenir dans la maison paternelle où tout me ramène à ma petite mère, accepter ce qui est désormais perdu, évaporé, disparu mais qui, je le sais, je le sens, vibre dans chaque objet, chaque meuble effleuré, caressé du regard. Allongée, la tête en travers de l’oreiller, les yeux dans les lambris du plafond, la tête vide mais néanmoins titillée par la somme de choses qu’il faudrait entreprendre pendant les quatre mois à venir, je ne me retrouve plus moi-même. Capable ou incapable ? Telle est la question qui ondule et rampe dans mon esprit défleuri.
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Par myrto le 24 Mai 2016 à 00:46
Parfois une route qui semble se terminer au bord du monde mais s'ouvre à l’espace déployé, à l’illimité, est plus représentative que ce " 8 " fatigué, ces deux zéros reliés par le nombril, censés symboliser l’infini
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Par myrto le 17 Mai 2016 à 03:17
(à eva-maïa)
Il y avait autrefois de l'affection, de tendres sentiments,
C'est devenu du bois.
Il y avait une grande politesse de paroles,
C'est du bois maintenant, des ramilles, du feuillage.
Il y avait de jolis habits autour d'un cœur d'amoureuse
Ou d'amoureux, oui, quel était le sexe?
C'est devenu du bois sans intentions apparentes
Et si l'on coupe une branche et qu'on regarde la fibre
Elle reste muette
Du moins pour les oreilles humaines,
Pas un seul mot n'en sort mais un silence sans nuances
Vient des fibrilles de toute sorte où passe une petite fourmi.
Comme il se contorsionne l'arbre, comme il va dans tous les sens,
Tout en restant immobile !
Et par là-dessus le vent essaie de le mettre en route,
Il voudrait en faire une espèce d'oiseau bien plus grand que nature
Parmi les autres oiseaux
Mais lui ne fait pas attention,
Il faut savoir être un arbre durant les quatre saisons,
Et regarder, pour mieux se taire,
Écouter les paroles des hommes et ne jamais répondre,
Il faut savoir être tout entier dans une feuille
Et la voir qui s'envole.Jules Supervielle - L'Arbre
Chaïm Soutine - L'arbre de Vence vers 1929
Le frêne de Vence a donné depuis longtemps son nom à la place Thiers
Lire un livre sous un arbre en double le plaisir. On ne sait plus si on tourne les pages ou si on feuillète l’arbre.
Jean Chalon
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Par myrto le 14 Mai 2016 à 02:05
Ma mère, que je l'aime en ce portrait ancien,
Peint aux jours glorieux qu'elle était jeune fille,
Le front couleur de lys et le regard qui brille
Comme un éblouissant miroir vénitien !
[...]
Ma mère que voici n'est plus du tout la même ;
Les rides ont creusé le beau marbre frontal ;
Elle a perdu l'éclat du temps sentimental
Où son hymen chanta comme un rose poème.
[...]
Emile Nelligan - "Devant deux portraits de ma mère" - Extraits
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Par myrto le 13 Mai 2016 à 02:01
Elle souriait
et son sourire – elle le semait à tous les vents.
Et les gens,
qui avaient l'air de se foutre éperdument
les uns des autres, se souriaient.
Se souriaient tout simplement,
se souriaient sans ironie
et sans envie,
car ce sourire les unissait.
Les couleurs même avaient changé,
plus de peine, plus d'ennui.
Un sourire.
Et ils se contemplaient les gens :
ils étaient bons, ils étaient beaux.[...]
Leonide Pachtchenko
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Par myrto le 12 Mai 2016 à 01:39
Petits points suspendus sur le fil de la phrase…
Passereaux en partance pour les chemins migratoires de la pensée…
Echappée de rêves entre le dessin rond-aigu des mots drus…
Silences habités…
Envol…
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Par myrto le 11 Mai 2016 à 01:49
Henri Le Sidaner - Le bec de gaz - Nuit bleue '1906)
Saisir, saisir le soir, la pomme et la statue,
Saisir l'ombre et le mur et le bout de la rue.
Saisir le pied, le cou de la femme couchée
Et puis ouvrir les mains. Combien d'oiseaux lâchés
Combien d'oiseaux perdus qui deviennent la rue
L'ombre, le mur, le soir, la pomme et la statue !
Jules Supervielle
Maillol - L'Air - Jardin des Tuileries (1938)
Statue de Maillol dans une rue de Perpignan
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Par myrto le 10 Mai 2016 à 01:21
Nous, comme autant de grains de sable précipités dans le grand sablier du temps.
Le temps, cette ombre qui fuit sur un très vieux cadran solaire.
Le jour, prometteuse éternité qui soudain se brise…
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