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L'enfant qu'est-il devenu
J'arrive où je suis étranger
(à mon père, trop loin, si proche)
[...]
C'est long vieillir au bout du compte
Le sable en fuit entre nos doigts
C'est comme une eau froide qui monte
C'est comme une honte qui croît
Un cuir à crier qu'on corroie
C'est long d'être un homme une chose
C'est long de renoncer à tout
Et sens-tu les métamorphoses
Qui se font au-dedans de nous
Lentement plier nos genoux
Ô mer amère ô mer profonde
Quelle est l'heure de tes marées
Combien faut-il d'années-secondes
A l'homme pour l'homme abjurer
Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n'est précaire comme vivre
Rien comme être n'est passager
C'est un peu fondre comme le givre
Et pour le vent être léger
J'arrive où je suis étranger
Louis AragonLa Mer - Zao Wou-ki
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Commentaires
Aragon (qui ne m'est pas sympathique comme homme) est l'un des poètes que je préfère (avec Neruda et Lorca qui les supplante tous les deux)...
Aragon a cette lucidité effrayante que je ne sais point exprimer moi-même (mais que je partage complètement). Aragon est le meilleur probablement en expression poétique ! Très beau choix Myrto !