-
Pâques, Toussaint puis Noël. Mon père définitivement seul parmi toutes les solitudes qui l’entourent désormais dans sa maison de retraite.
Fichus repères qui jalonnent les ans et le ramènent forcément aux vieilles, fidèles, tenaces nostalgies sans lesquelles il n’a jamais su vivre.
Je la connais trop bien la sensibilité de mon père, soigneusement cachée sous sa bogue de poisson-lune.
Picasso (détail)
Tant de questions, si peu de réponses. Tant de doutes, si peu de certitudes.
1 commentaire -
Elle sort son petit chien blond seule désormais, elle que je ne connais pas mais que j’ai tant de fois croisée au bras de son mari, ces inséparables, ces jamais l’un sans l’autre tellement anachroniques aujourd’hui où les princesses d’un jour n’épousent plus pour toujours.
2 commentaires -
Carl Vilhelm Holsoe - Johanna Harmon
(à tes 10 ans ma Juste) - Premières années
Une fois dix, dix
Petite-fille, petite fée, mignonne étoile
Arrivée de la voie lactée des enfants
Fillette-fleur, tantôt rieuse, tantôt grave
Vivante comme la pluie des perséides
Brasillant au ciel d'été.
Demoiselle déjà ! coquette et caetera...
Tu rêves à la beauté de l'écharpe d'Iris
Sur ton cou de poupée.
Tu tiens entre tes mains la baguette magique
Qui allume le feu du soleil de midi
Et fait venir la nuit.
Autant d'années-lumière sont ces ans qui s'envolent
Que tu trouves si longs dans l'impatience vive
Où tu es de connaître.
L'impatience est souvent affaire de jeunesse
Et le temps vient toujours trop tôt de la sagesse
Si douce est l'insouciance.
Cours, trottine et gambade gracieuse gazelle
Au ciel bleu de l'enfance qui garde tous nos rêves
Parmi les astres d'or.
(2001)
2 commentaires -
...
L'air est fait d'un cristal fluide qu'on croit voir.
L'horizon délicat tremble dans les buées,
Et dès l'après-midi l'on sent déjà le soir.
... (Louis Mercier)
1 commentaire -
-
Amadeo Modigliani
Mots en suspens
rien que du mystère sombre dans la lumière
de la poussière dans le vent
la résonance non aboutie d’une émotion.
Rien que l’ébauche d’une image à double visage ?
3 commentaires -
Toujours imposante la vieille grille que traversent les rayons presque palpables du soleil couchant !
La vieille grille qui ouvre sur l’immensité verte d'un vignoble soigné.
Et sur tous ces châteaux dont les noms chantent, sur tous ces ceps qui, le moment venu, pleureront leurs larmes d'or pâle, d'aubes roses, de rouges insensés dans l'élégant cristal, arrondi ou flûté qui les recevra.
J’aime les vieilles grilles abandonnées, qui ferment mal sur des bâtisses que les humains ont désertées. J'aime le mystère de ces vantaux béants, mal fichus, tordus qui semblent demander au ciel la grâce d'une deuxième vie.
La Victoire - Magritte - gouache 1939
2 commentaires -
Pierre que nul regard ne toucha,
Pierre qu'aucune main ne prit.
Pure de tout regard, de tout penser,
vierge de toute connaissance des hommes
telle que jaillie de la terre,
si longtemps retenue dans ses profondeurs,
dans le gouffre maternel de son ventre.
Pierre proche de l'aube première,
du premier feu, du feu unique,
du dieu du feu.Cirque dolomitique de Mourèze (34)
Pèira que ges d'agach non toquèt pas,
Pèira que ges de man la prenguèt pas.
Linda de tot agach, de tot pensar,
vèrge de tot saupre dels òmes
tala qu'espelida de tèrra,
dins sa fonzor tant de temps retenguda,
dins la fonzor mairala de son ventre.
Pèira pròcha de la prima auba
dau fuòc primièr, dau fuòc unenc
dau dieu de fuòc.Peira - (D'aicí mil ans de lutz - Max Rouquette)
votre commentaire -
Charles Camoin - Les pins
La mer adorante
Tu regardais la mer... Couché sur la falaise,
Je te voyais debout au bord de la fournaise
Où brûlaient, au-dessus des flots, les rocs épars.
Pas un souffle. Les pins craquaient. De toutes parts,
Un soleil dévorant s'abattait sur les choses,
Et toi, qui respirais une touffe de roses,
Distraitement, sur les rochers tu l'effeuillas…
On voyait sous les pins scintiller les villas ;
L'herbe sèche cherchait l'ombre maigre des branches
Et le sable enflammé buvait les vagues blanches.
Rien ne pouvait subir la fureur de l'éther.
Tout dormait. Et toi seule, au-dessus de la mer,
Tu te dressais, sauvage, avec ta chevelure
A moitié déroulée, et tendant ta figure
Aux rayons enflammés de l'astre, tu parus
Un moment, tant l'air chaud tremblait sur tes bras nus,
Etre l'autel vivant de l'ardent paysage,
Et je voyais la mer adorer ton visage.
Joachim Gasquet (1873-1921) - Les chants séculairesJoachim Gasquet par Cézanne
"Songez que l'histoire du monde date du jour où deux atomes se sont rencontrés, où deux tourbillons, deux danses chimiques se sont combinées. Ces grands arcs-en-ciel, ces prismes cosmiques, cette aube de nous-mêmes au-dessus du néant, je les vois monter, je m'en sature."
Joachim Gasquet – Cézanne Ed. Encre marine 2002
1 commentaire -
Hue, bagnoles !
Il est midi.
Grande ogresse
La ville avale tout.
La rue rebelle
Pleine à ras-bord
Asphyxiée,
Explose de sons,
de klaxons.
La crue croît.
La file bifide
Vers les faubourgs
Bifurque.
Le flot se reforme sans fin.
L'air alourdi, empuanti
S'épaissit, s'opacifie.
Août incandescent
Bombarde
ses hallebardes de feu
sur le lent courant
Qui maintenant se fige.
Hébétée, submergée,
Paralysée,
La ville saturée
Suffoque.(Août 2011 - fin de matinée en été)
5 commentaires -
Cigale, ma discrète
ma belle en dentelle de cendre,
grise sur la grise écorce
n’es-tu que ce bel été qui chante ?
Cigale, ma secrète
invisible, obstinée divette,
n’es-tu que cette vibration stridente qui signe les heures brûlantes ?
5 commentaires -
Y'a des éclats de ciel dans mon jardin,
D'océan, d'horizon,
Des regards bleus de mille sortes,
De prusse et de lapis qui me ravissent.
Y'a des couleurs d'aurore et de petit matin
Des parfums, des senteurs,
Des chants ensorceleurs,
Des vols gracieux, des gliss'ments soyeux.
Sous la branche du pin et au travers
Le ciel est vert.
Regarde comme le soleil brasille
Dans cette trame étrange que tissent les aiguilles !
3 commentaires -
-
Terre-Lune, Terre-Lune
Ce soir j'ai mis mes ailes d'or
Dans le ciel comme un météore
Je pars
Terre-Lune, Terre-Lune
J'ai quitté ma vieille atmosphère
J'ai laissé les morts et les guerres
Au revoir
Dans le ciel piqué de planètes
Tout seul sur une lune vide
Je rirai du monde stupide
Et des hommes qui font les bêtes
Terre-Lune, Terre-Lune
Adieu ma ville, adieu mon cœur
Globe tout perclus de douleurs
Bonsoir.
Boris Vian, Terre-Lune
6 commentaires -
-
La nuit descend.
Dans le vent de ses cheveux elle se balance.
Vers le ciel d'été, légère, elle s'élance !
Danse claire des lucioles, elle s'envole...
Les yeux dans l'outremer elle sourit aux étoiles.
Heure bleue où Deneb et Véga se dévoilent
Et, avec Altaïr, forment le Grand Triangle.
Mais voici que soudain l'immense empyrée tangue
Troublant un court instant le paisible séjour
Des dieux qu'elle croyait endormis pour toujours...
2 commentaires