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Par myrto le 28 Mars 2016 à 02:53
Poum ! le temps d'une explosion, et je suis là, jailli vous ne savez d'où. Poum ! j'ai cassé, d'un bond exprès maladroit, le vase de Chine, et poum ! me voilà collé, comme une pieuvre noire, au museau blanc du lévrier, qui crie avec une voix de femme battue... Poum ! parmi les tendres bégonias prêts à fleurir, et qui ne fleuriront plus...
Poum ! au beau milieu du nid de pinsons qui pépiaient, confiants, à la fourche du sureau... Poum ! dans la jatte de lait, dans l'aquarium de la grenouille, et poum ! enfin, sur l'un de vous.
En trois secondes, j'ai tiré une mèche de cheveux, mordu un doigt, marqué quatre fleurs de boue sur la robe blanche, et je m'enfuis... N'essayez pas de me retenir par la queue, ou je jure un mot abominable, et je vous laisse dans la main une pincée de poils rêches, qui sentent le brûlé et donnent la fièvre !
Et gardez-vous, si je chante trop haut, cette nuit, de mettre le nez à la fenêtre : vous pourriez mourir soudain de me voir, sur le faîte du toit, assis tout noir au centre de la lune !...
Colette - La Paix chez les bêtes
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Par myrto le 17 Mars 2016 à 02:13
« Coquelicot. C’est un cri, c’est un appel, c’est un mot de joues rouges et de course folle dans les blés, de mollets piqués par les chardons, de roulades et de cul par-dessus tête dans le fossé.
C’est un mot claquant, insolent, cueille-moi si tu l’oses, je me fanerai aussitôt mais regarde : je suis légion. Je pousse et je re-pousse, et dans cette flaque rouge tu ne sais plus où poser les yeux. Coquelicots, cavalcade, concours à qui sera le plus rouge, tes joues ou moi. »
Anne sylvestre – Coquelicot et autres mots que j’aime (Points 2014)
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Par myrto le 13 Mars 2016 à 03:11
Andrzej Malinowski - Blanc de lys
[...]
Et tu fis la blancheur sanglotante des lys
Qui roulant sur des mers de soupirs qu'elle effleure
A travers l'encens bleu des horizons pâlis
Monte rêveusement vers la lune qui pleure ![...]
Stéphane Mallarmé - Les Fleurs
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Par myrto le 10 Mars 2016 à 02:10
Picasso - Le Rêve
Le visage de ceux qu’on n’aime pas encor
Apparaît quelquefois aux fenêtres des rêves
Et va s’illuminant sur de pâles décors
Dans un argentement de lune qui se lève.[...]
Anna de Noailles
Egon Schiele - La Rêveuse
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Par myrto le 20 Février 2016 à 02:59
Se trouver dans le poème, vivre l’instant troublant de l’entière empathie
On s’en vient seul et l’on s’en va de même.
On s’endort seul dans un lit partagé.
On mange seul le pain de ses poèmes.
Seul avec soi on se trouve étranger.
Seul à rêver que gravite l’espace,
Seul à sentir son moi de chair, de sang,
Seul à vouloir garder l’instant qui passe,
Seul à passer sans se vouloir passant.de Liliane Wouters, poète belge née en 1930. Prix Apollinaire 2015 pour son recueil Derniers feux sur terre, Le Taillis Pré, et pour l'ensemble de son œuvre.
Jérôme Arbonville - peintre de la foule
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Par myrto le 11 Septembre 2015 à 00:58
Pierre que nul regard ne toucha,
Pierre qu'aucune main ne prit.
Pure de tout regard, de tout penser,
vierge de toute connaissance des hommes
telle que jaillie de la terre,
si longtemps retenue dans ses profondeurs,
dans le gouffre maternel de son ventre.
Pierre proche de l'aube première,
du premier feu, du feu unique,
du dieu du feu.Cirque dolomitique de Mourèze (34)
Pèira que ges d'agach non toquèt pas,
Pèira que ges de man la prenguèt pas.
Linda de tot agach, de tot pensar,
vèrge de tot saupre dels òmes
tala qu'espelida de tèrra,
dins sa fonzor tant de temps retenguda,
dins la fonzor mairala de son ventre.
Pèira pròcha de la prima auba
dau fuòc primièr, dau fuòc unenc
dau dieu de fuòc.Peira - (D'aicí mil ans de lutz - Max Rouquette)
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Par myrto le 22 Août 2015 à 02:36
Charles Camoin - Les pins
La mer adorante
Tu regardais la mer... Couché sur la falaise,
Je te voyais debout au bord de la fournaise
Où brûlaient, au-dessus des flots, les rocs épars.
Pas un souffle. Les pins craquaient. De toutes parts,
Un soleil dévorant s'abattait sur les choses,
Et toi, qui respirais une touffe de roses,
Distraitement, sur les rochers tu l'effeuillas…
On voyait sous les pins scintiller les villas ;
L'herbe sèche cherchait l'ombre maigre des branches
Et le sable enflammé buvait les vagues blanches.
Rien ne pouvait subir la fureur de l'éther.
Tout dormait. Et toi seule, au-dessus de la mer,
Tu te dressais, sauvage, avec ta chevelure
A moitié déroulée, et tendant ta figure
Aux rayons enflammés de l'astre, tu parus
Un moment, tant l'air chaud tremblait sur tes bras nus,
Etre l'autel vivant de l'ardent paysage,
Et je voyais la mer adorer ton visage.
Joachim Gasquet (1873-1921) - Les chants séculairesJoachim Gasquet par Cézanne
"Songez que l'histoire du monde date du jour où deux atomes se sont rencontrés, où deux tourbillons, deux danses chimiques se sont combinées. Ces grands arcs-en-ciel, ces prismes cosmiques, cette aube de nous-mêmes au-dessus du néant, je les vois monter, je m'en sature."
Joachim Gasquet – Cézanne Ed. Encre marine 2002
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Par myrto le 11 Juin 2015 à 01:32
Terre-Lune, Terre-Lune
Ce soir j'ai mis mes ailes d'or
Dans le ciel comme un météore
Je pars
Terre-Lune, Terre-Lune
J'ai quitté ma vieille atmosphère
J'ai laissé les morts et les guerres
Au revoir
Dans le ciel piqué de planètes
Tout seul sur une lune vide
Je rirai du monde stupide
Et des hommes qui font les bêtes
Terre-Lune, Terre-Lune
Adieu ma ville, adieu mon cœur
Globe tout perclus de douleurs
Bonsoir.
Boris Vian, Terre-Lune
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Par myrto le 9 Juin 2015 à 02:24
Paroles : Jean-Loup Dabadie - Musique : Alain Goraguer
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Par myrto le 26 Avril 2015 à 02:11
Te voilà, rire du Printemps !
Les thyrses des lilas fleurissent.
Les amantes qui te chérissent
Délivrent leurs cheveux flottants.Sous les rayons d’or éclatants
Les anciens lierres se flétrissent.
Te voilà, rire du Printemps !
Les thyrses de lilas fleurissent.Couchons-nous au bord des étangs,
Que nos maux amers se guérissent !
Mille espoirs fabuleux nourrissent
Nos coeurs gonflés et palpitants.
Te voilà, rire du Printemps !Théodore de Banville
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Par myrto le 11 Mars 2015 à 01:59
Une vapeur, un brouillard,
Un nuage m'entourait.
J'allais dans San Jeronimo
Vers le port presque endormi
Quand hors de l'hiver
Une montagne de lumière jaune,
Une tour en fleurs parut sur le chemin
Et tout fut empli de parfum.
C'était un mimosa.
Pablo Neruda
[...]
Mimosa soleil terrestre, explosion du parfum,
cascade, cataracte, chevelure de tout le jaune
déversé en une seule vague de feuillage,
mimosa en avant dans l’hiver austral
comme un vaillant militaire jaune, avant la bataille,
nu, désarmé, face aux bataillons de la pluie, mimosa.
[...]Je te proclame rayon de miel du monde :
nous voulons un instant être bourdons sylvestres,
élégantes, alcooliques guêpes,
frelons de miel et de velours,
plonger les yeux, la chemise, le cœur, les cheveux
dans ta frémissante senteur, dans ta coupe jaune
jusqu’à ne plus être qu’arôme dans ta planète,
pollen d’honneur, intimité de l’or, plume de ta fragrance.Pablo Neruda - Extrait du Troisième Livre des Odes
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Par myrto le 9 Janvier 2015 à 20:48
Sous un grand ciel gris, dans une grande plaine poudreuse, sans chemins, sans gazon, sans un chardon, sans une ortie, je rencontrai plusieurs hommes qui marchaient courbés.
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Par myrto le 12 Décembre 2014 à 19:16
à Margareth, Ymi, Eva
Voici des vers que mon père, de temps en temps, prononce avec plaisir sans autre indication que le souvenir de les avoir appris autrefois. Curieuse, j’ai recherché le texte du « petit zéphir » et me suis aperçue que ces vers continuaient de fleurir dans la mémoire de personnes nées dans les années 20.
Peut-être aurez-vous envie de découvrir en entier ou de relire jusqu’au bout cette longue pièce de vers au charme suranné ?
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Par myrto le 27 Novembre 2014 à 01:46
L'ombre venait, les fleurs s'ouvraient, rêvait mon âme !
Et le vent endormi taisait son hurlement.
La nuit tombait, la nuit douce comme une femme
Subtile et violette épiscopalement.Les étoiles semblaient des cierges funéraires
Comme dans une église allumée dans les soirs
Et semant des parfums, les lys thuriféraires
Balançaient doucement leurs frêles encensoirsUne prière en moi montait, ainsi qu'une onde
Et dans l'immensité bleuissante et profonde
Les astres recueillis baissaient leurs chastes yeux ;Alors, Elle apparut ! Hostie immense et blonde
Puis elle étincela, se détachant du monde,
Car d'invisibles doigts l'élevaient vers les cieux !Paul VALERY
Élévation à la Lune - 23 Juillet 1889
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Par myrto le 10 Novembre 2014 à 00:43
…
Tous les cris se sont tus, les râles sont poussés.
Sur le sol bossué de tant de chair humaine,
Aux dernières lueurs du jour on voit à peine
Se tordre vaguement des corps entrelacés ;
Et là-bas, du milieu de ce massacre immense,
Dressant son cou roidi, percé de coups de feu,
Un cheval jette au vent un rauque et triste adieu
Que la nuit fait courir à travers le silence.
…
Le Soir d’une Bataille - Leconte de Lisle
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Par myrto le 7 Novembre 2014 à 02:19
La lampe dans la chambre est une rose blanche
Qui s'ouvre tout à coup au jardin gris du soir ;
Son reflet au plafond dilate un halo noir
Et c'est assez pour croire un peu que c'est dimanche.La lampe dans la chambre est une lune blanche
Qui fait fleurir dans les miroirs des nénuphars ;
On ne sait plus quel jour il est, ni s'il est tard,
Sauf qu'on est doux comme à la fin d'un beau dimanche.Sourire de la lampe en sa dentelle blanche
Qu'on dirait une coiffe où dorment des cheveux ;
Lampe amicale aux lents regards d'un calme feu
Qui donne à l'air de chaque soir l'air du dimanche.Georges Rodenbach
Peter Vilhelm
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